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Le petit guide du rechargement

inspiré et fait par le blog de Phoz, lundi 2 juillet 2007à 18:05

Pourquoi recharger ?

Tout d'abord, il faut savoir qu'acheter des munitions peut se révéler onéreux, et réutiliser certains composants fait faire des économies. Recharger, c'est aussi un plaisir, cela permet de créer une munition adaptée à chaque tireur, chaque environnement ainsi que chaque arme, et surtout de posséder une munition extrêmement fiable et pouvant atteindre une précision inégalable avec des cartouches du commerce (dites manufacturées).
Cependant, cela demande un investissement de temps considérable et ne s'improvise pas : il y a des règles strictes à respecter à la lettre. Une cartouche reste une cartouche et un incident de tir est vite arrivé si l'on vient à faire n'importe quoi.


Une presse de rechargement

Dans cet article je vais vous exposer les principes et les bases du rechargement.
Une cartouche, qu'est-ce que c'est ?
Une cartouche est composée d'un étui (la douille), auquel on ajoute une amorce à l'arrière (le culot). On verse une certaine quantité de poudre dans cette douille puis on insère l'ogive dans la partie supérieure (le collet). Lorsqu'on appuie sur la détente de l'arme, le percuteur, comme son nom l'indique, va venir frapper l'amorce, qui va allumer la poudre. Lors de sa combustion, la poudre produit des gaz, provoquant une augmentation de la pression dans la cartouche, et sous la pression, l'ogive est projetée par le canon de l'arme.



Une fois notre munition percutée, il ne nous reste plus que la douille et l'amorce, la poudre ayant brulé et l'ogive s'étant écrasée là où le tireur l'a envoyée. La douille est elle réutilisable, ce qui n'est pas le cas de l'amorce (puisqu'elle a été percutée et ne peut donc plus fonctionner). Voici une amorce percutée :


Amorce percutée

La première étape du rechargement consiste donc à désamorcer (enlever l'amorce) la cartouche et recalibrer la douille (en effet, avec la pression la douille peut se déformer légèrement et il faut donc lui redonner sa forme d'origine). Pour cela, il est nécessaire d'utiliser une presse à munitions et un jeu d'outils correspondant au calibre de la douille. Une presse sert à maintenir les cartouches en place pour leur faire subir le passage dans chaque outil du jeu d' outil .


Presse RCBS "Rock Chucker"


Jeu d'outils ("die set" en anglais) RCBS de calibre 8x57

Il existe différents types d'outils : les outils qui désamorcent, ceux qui recalibrent, qui évasent, qui enfoncent les ogives, qui sertissent. En général, les jeux d'outils des armes d'épaule sont composés d'un outil qui désamorce et recalibre à la fois, d'un second qui enfonce l'ogive et parfois d'un outil permettant de sertir ses cartouches ("factory crimp"). Les jeux d'outils des armes de poing sont composés d'un premier outil pour désamorcer et recalibrer à la fois, d'un second pour évaser la douille (afin que l'ogive puisse être posée dessus) et d'un dernier pour enfoncer l'ogive.


Jeu d'outils RCBS en carbure de tungstène de calibre 9mm

Une fois le premier outil vissé sur la presse et réglé (je ne détaillerai pas les réglages), il faut impérativement lubrifier la douille pour ne pas qu'elle reste coincée dans l' outil , sauf en cas d'utilisation d'outils spéciaux en carbure de tungstène qui ne nécessitent pas de lubrifier les étuis.


Lubrification d'un étui

On fixe ensuite sur la presse un support de douille ("shell holder" en anglais) adapté au calibre afin de pouvoir bloquer la douille sur ce support.


Support de douille (shell holder)


Shell holder en place sur la presse

On cale maintenant la douille sur le support de douille, on actionne le levier, et la douille est emmenée dans le premier outil : l' outil de désamorçage et de reformage de la douille (ou recalibrage).


Douille fixée sur la presse

La pointe dépassant de l' outil à recalibrer va pousser sur l'amorce afin de l'extraire de la fouille, et la forme de l' outil va redonner à l'étui sa forme initiale.


La presse, levier actionné

La douille est donc désamorcée :


Douille recalibrée et désamorcée

L'étape suivante consiste à nettoyer les douilles afin d'enlever la graisse utilisée au cours du recalibrage et de les rendre plus propres. Il existe deux solutions : les bac à ultrasons, qui présentent l'avantage de nettoyer les logements d'amorces, et les tumblers. Le bac à ultrasons, comme son nom l'indique, nettoie les étuis en les faisant vibrer, grâce aux ultrasons, dans une cuve de solution. Le tumbler, quand à lui, utilise également les vibrations, mais ceci pour faire bouger des petits graviers abrasifs (appelé le "media"), ce qui a l'avantage de polir les étuis en plus de les nettoyer. Chaque solution a donc ses avantages, mais également ses inconvénients : il faut sécher les douilles après leur sortie du bac à ultrasons, et il faut enlever le média de chaque douille après nettoyage au tumbler. Ces deux engins produisent des nuisances sonores : un son très aigüe pour les ultrasons et un bruit sourd pour le tumbler.
Il est cependant possible de faire cohabiter ces deux appareils : on nettoie la graisse et les résidus de poudre à l'intérieur de l'étui grâce au bac à ultrasons, puis on polit les cartouches dans le tumbler.


Bac à ultrasons


Puis le passage au tumbler


La douille nettoyée puis polie

Pour arriver à ce résultat, j'ai passé cette douille dans le bac à ultrasons à 70-80° pendant 25 minutes environ, le tout baignant dans un mélange d'eau et de produit de nettoyage à base d'ammoniac (ou alors eau + ammoniac directement, mais attention à utiliser cette solution en milieu aéré et en prenant ses précautions ! Vos poumons vous remercieront). Après avoir été séché au sèche-cheveux, l'étui a passé 3h dans le tumbler avec du media Lyman, ainsi qu'un peu de Polish. Pour finir, la douille est essuyée avec un chiffon, et là voilà brillante. J'avoue que je ne nettoie pas toutes mes douilles de cette façon, mais quel plaisir d'avoir des "munitions miroir" de temps en temps !


Un peu de polish dans le tumbler et vos douilles sortiront brillantes !

Lors du tir, il arrive que les douilles se déforment en longueur (en particulier dans les armes d'épaule) et gagnent ainsi quelques mm. Il faut donc les raccourcir grâce au trimmer afin de faire retrouver aux étuis leur taille d'origine. On fixe la douille dans le trimmer, et enlève de la matière grâce à l'embout aiguisé en tournant la poignée jusqu'à obtenir la taille voulue. Je ne détaillerai pas le réglage du trimmer, d'autant plus qu'il existe un grand nombre de systèmes différents se réglant de différentes manières.


Trimmer RCBS en action

Il faut maintenant placer une amorce neuve dans le logement d'amorce de chaque douille. C'est une étape très simple : on fixe la douille nettoyée, recalibrée et éventuellement trimmée sur l'amorceur, on remplit la réserve de cet amorceur puis on presse la poignée. La douille est maintenant amorcée, prête à passer à l'étape suivante.


Amorçage d'une douille (Amorceur à main RCBS )

Dans le cas de l'utilisation d'ogives à fond plat et pour les calibres d'armes de poing, il est nécessaire d'utiliser un outil supplémentaire : l'évaseur. Comme son nom l'indique, l' outil évase le collet de la douille, et ceci simplement afin de faciliter la pose de l'ogive et sa tenue sur le collet avant de l'enfoncer. Cet outil est constitué d'une mandrin, du diamètre de la douille, qui vient s'insérer dans la douille, et qui s'élargit à la base. En emmenant ce mandrin dans la douille, on évase donc la partie supérieure. Je ne détaillerai pas le réglage de cet outil .

Nos douilles sont maintenant propres, amorcées et, si nécessaire, évasées. Nous arrivons à l'étape cruciale du chargement en poudre.
Il faut savoir qu'il existe une grande variété de poudres présentant des caractéristiques différentes, comme leur forme (billes, sphères, paillettes, etc...), leur "rapidité" (vitesse à laquelle est consumée une poudre) ou encore leur masse volumique. Les marques les plus utilisées en France sont SNPE (Société Nationale des Poudres et Explosifs), Vihtavuori ou encore Hodgdon. Chaque poudre est destinée à une utilisation précise et on ne peut donc pas utiliser n'importe quelle poudre pour n'importe quel calibre.


Différentes poudres

Il est indispensable de se référer aux tables de chargement fournies par les fabriquants et de choisir le type de poudre et la dose les mieux adaptés au calibre et à la cartouche voulue. En fonction du poids, de la forme et de la taille de l'ogive utilisée, le type de poudre et la dose peuvent donc changer. Il faut suivre strictement les charges indiquées et ne JAMAIS mettre une charge qui semblerait correcte. RIEN N'EST LAISSÉ AU HASARD ! UNE ERREUR PEUT PROVOQUER UN INCIDENT, VOIRE MÊME UN ACCIDENT DE TIR ET AVOIR DE GRAVES CONSÉQUENCES !


Différentes manuel de chargement

Vous pouvez par la suite reporter ces valeurs dans un tableau plus simple, et présentant uniquement les valeurs dont vous avez besoin,, calculant en plus les divers coûts du rechargement de ainsi que la rentabilité de vos cartouches rechargées.



Maintenant que nous connaissons le type de poudre et la charge correspondants à l'ogive choisie et au calibre que nous utilisons, il faut verser de cette poudre dans la doseuse, puis régler la régler afin pour qu'elle délivre la charge exacte nécessaire et ceci de façon extrêmement régulière (je ne détaillerai pas non plus les réglages, de plus ils diffèrent d'une doseuse à une autre). CHAQUE CHARGE DOIT ÊTRE PESÉE SUR UNE BALANCE DE PRÉCISION AVANT D'ÊTRE INSÉRÉE DANS LA DOUILLE : UNE ERREUR NE PEUT PAS ÊTRE TOLERÉE CONNAISSANT LA POTENTIELLE DANGEROSITÉ D'UNE CHARGE INADAPTÉE (que ce soit une surcharge ou une souscharge, qui sont aussi dangeureuses l'une que l'autre).


Remplissage de la doseuse


Vérification de la charge


Chargement de la douille

Notre douille approche maintenant du stade de cartouche, il ne lui manque plus qu'une ogive.
Il faut maintenant fixer le second outil (ou troisième dans le cas de l'utilisation d'un évaseur) sur la presse, le régler (je ne donnerai pas de détails non plus) pour qu'il enfonce l'ogive à la bonne profondeur et qu'il sertisse plus ou moins le collet sur l'ogive. Attention, l'enfoncement de l'ogive est un paramètre très important lors du rechargement, il faut respecter les mesures indiquées dans les tables de chargement (au même titre que le sertissage) : en effet, modifier l'enfoncement de l'ogive va transformer le volume de la cartouche, et ainsi la combustion et la montée en pression seront différentes. Ensuite, on pose la douille sur le support de la presse, on actionne le levier et, après avoir vérifié la taille totale de la cartouche et l'enfoncement de l'amorce, la cartouche est prête à être tirée !


La cartouche finale obtenue

...prête à être tirée, sauf en cas d'utilisation d'une arme d'épaule semi-automatique. En effet le mécanisme de ce type d'armes peut, si la cartouche n'est pas ou trop peu sertie, littéralement "éjecter" l'ogive (qui va se coincer dans le canon) lors du chambrage sous l'effet de l'inertie. L'étape du sertissage est donc indispensable en cas d'utilisation d'une arme d'épaule semi-auto (ou automatique, mais en France les "full auto" sont prohibés). Il s'agit d'un dernier outil , qui se fixe également sur la presse, et qui, lorsqu'on enclenche le levier, appuie fortement sur le collet, et ainsi l'ogive est suffisament sertie.

Un espace de travail propre et organisé est recommandé. Cela permet d'éviter d'être distrait et de travailler dans de meilleures conditions afin d'éviter au maximum les erreurs, mais aussi d'être plus productif.


J'espère que ce guide aura pu vous faire découvrir le rechargement ou vous y donner goût.
N'oubliez pas qu'il est très préférable d'avoir une personne expérimentée dans le rechargement à vos côtés pour vos premières cartouches.